La réalité paysagère des politiques publiques européennes
Comment, par le levier du Programme LEADER, peut-on faire du Paysage ?
Nous nous intéresserons ici à l'inscription des politiques européennes dans le territoire de la CCE. Pour cela, nous traiterons dans un premier temps de leur inscription actuelle dans le paysage, puis nous nous concentrerons sur le Marais de la Vergne, ses enjeux et potentiels.
Les Politiques publiques européennes dans la CCE
LEADER
NATURA 2000
périmètre Natura 2000 sur la CCE
Le Programme LEADER est une politique européenne ascendante favorisant le développement économique en territoire rural.
Il vise à accompagner et soutenir des projets portés par les acteurs du territoire.
Le programme LEADER de la Haute Gironde est basé sur 5 objectifs :
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TOURISME : Favoriser l'attractivité et la compétitivité touristique du territoire
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PATRIMOINE : Sauvegarder et valoriser le patrimoine culturel et environnemental
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AGRICULTURE : Soutenir le développement d'une agriculture durable et diversifiée
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ÉNERGIE : Faire de la Haute Gironde un pôle énergie
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COOPÉRATION : Favoriser l'itinérance autour de l'estuaire et de l'économie circulaire
Le réseau Natura 2000 rassemble des sites naturels ou semi-naturels de l'Union européenne ayant une grande valeur patrimoniale, par une faune et/ou une flore exceptionnelle.
Les 3 grands enjeux de Natura 2000 :
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Maintenir et Reconquérir les surfaces et les fonctionnalités des habitats et des habitats d’espèces d'intérêt communautaire (réseau hydrographique, forêts, espaces agricoles…)
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Sensibiliser les acteurs locaux et la population aux enjeux du site
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Evaluer la connaissance des enjeux biologiques et les résultats par un suivi des actions
Inscription de ces politiques sur le territoire
Passez votre souris sur la carte pour découvrir des exemples précis d'impacts des politiques publiques européennes sur le paysage de la CCE
Pleine-Selve
N
Saint-Ciers-sur-Gironde
Braud-et-Saint-Louis
L’exemple du paysage du Marais de la Vergne
Le marais de la Vergne concentre les enjeux paysagers, entre terre et mer, avec un potentiel touristique et agricole. Les programmes européens Natura 2000 et LEADER y sont très présents.
Le marais de
la Vergne
Les marais
Le Passage
Lorsque le Marais de la Vergne est inondé, il apparaît comme un miroir révélant les vestiges de l'exode rurale.
Situations précises du marais de la Vergne, leurs paysages et acteurs associés
Les paysages choisis ont un rapport nourricier entre l’habitant et la terre.
Les paysages de chasse à la tonne :
Les tonnes de chasse le long du Canal Bellet
Le ciel se reflète dans la mare de tonne, cela dédouble la grandeur du paysage. Les grands espaces de tonnes sont ouverts par le paysage mais séparés physiquement par des barrières végétales telles que des roseaux. Au loin les rebords du marais délimitent l'horizon.
Les tonnes sont semi-enterrées, ainsi les chasseurs bénéficient d'un contact fort avec la terre du Marais, ils se fondent dans le paysage.
Les paysages de pêche au carrelet :
Entre l'écluse du Passage et la Patte d'oie
Paysage fermé par la végétation de ripisylve. Par la patience et le silence, les carrelets se fondent dans les berges du canal.
Les canaux sont comme les artères du Marais de la Vergne, toutes les activités s’articulent autour d’eux.
Les paysages de production agricoles :
La Blancheterie
La route D136 longe les limites du nord du Marais de la Vergne entre Braud-et-Saint-Louis et Etauliers. Cette frange possède un paysage très varié entre maraîchages, vignes, sylviculture, élevage…
Au lieu-dit de la Blancheterie, des serres plastiques blanches alignées contrastent avec l'arrière-plan boisé, sombre et irrégulier composé de chêne, de peuplier et de pin. Plus loin sur une légère pente, le paysage est rythmé par la linéarité des vignes.
Le chasseur à la tonne
A l’abri dans des tonnes (cabanes de chasse semi-enterrées), il tire sur les canards dans les mares en face, majoritairement de nuit. Le chasseur a un contact très fort avec son habitat notamment en entretenant les zones humides pour pouvoir continuer son activité, et en ayant un contact direct avec la faune présente, dans le respect des règles imposées.
Le pêcheur au carrelet
De nos jours, une vingtaine de familles vivent presque exclusivement de la pêche ce qui est 30 fois moins qu’autrefois (disparition de certaines espèces migratrices). La pêche est un lien entre le marais et l’Estuaire, agriculture et patrimoine, et offre un terroir apprécié (le poisson de l’Estuaire).
L'éclusier
L’éclusier joue un rôle majeur et déterminant dans le Marais de la Vergne. En effet, c’est lui qui régule le niveau d’eau dans le marais. Il intervient notamment lors des crues que connaît la CCE. Son rôle est également de mettre en eau les parcelles de chasse à la tonne à la mi-avril et de les assécher à la mi-août.
Le viticulteur
Les vignobles sont présents à très petite échelle dans le Marais de la Vergne. Ils constituent la frontière entre les marais humides et secs, en créant une limite marquante avec la présence de coteaux. La culture et l’entretien des vignes se fait manuellement et demande beaucoup de main d'œuvre, en particulier l’été.
Le maraîcher
Ces acteurs sont très présents et marquent fortement le paysage avec la présence des serres et des bâches. La culture des asperges se fait manuellement. Lors de la récolte, les producteurs sont donc contraints d’embaucher beaucoup de main d'œuvre.
Le département
Le département a une forte emprise sur le territoire, notamment au travers de son droit de préemption et de sa politique de gestion du foncier.
Le sylviculteur
Les paysages de bocages:
L'exploitation de M. Egretier, lieu-dit Pallard
Le paysage pastoral de l’exploitation de monsieur Egretier a une forte valeur esthétique. Le pâturage crée des ouvertures cloisonnées entre les haies bocagères et les peupleraies. Des fenêtres s’ouvrent et se referment, on peut alors apercevoir une métairie en ruine, vestige du passé. Aujourd’hui, cet éleveur est le dernier du Marais de la Vergne.
L'éleveur bovin
Le pâturage est une activité traditionnelle des marais. Cependant depuis 1950 l’activité pastorale est de moins en moins présente, l'élevage est devenu extensif.
On trouve dans le Marais de la Vergne de nombreuses parcelles dédiées à la production de bois,presque exclusivement des peupleraies, dont les parcelles sont de taille moyenne.
Ce qui rassemble et ce qui éloigne les acteurs du marais
Désaccords
Accords
Chaque acteur du marais ayant des préoccupations différentes, il existe de nombreux conflits.
Conflits entre instances et habitants :
Conflits entre habitants :
Bien que les acteurs semblent de prime abord être trop divisés pour être rassemblés, les habitants ont tout de même des points communs.
attachement commun profond et ancien à la terre
forte appropriation du territoire
rapport nourricier, gourmand aux terres.
De plus, les habitants du marais y sont très attachés car le c'est un lieu isolé du reste du territoire. Une fois fédérés, la possibilité d’une coopération serait alors envisageable.
Si les acteurs sont aujourd'hui divisés, nous sommes convaincues qu'en coopérant autour du paysage, ils pourraient faire valoir leur problématiques communes et ainsi résoudre leurs conflits.
Proposition méthodologique de médiation paysagère :
Faire du paysage un levier pour les politiques européennes
Il est pour cela nécessaire qu'ils aient une conscience collective de leurs paysages. Pour y parvenir, il est primordial de comprendre et de mettre en commun la pluralité de leurs paysages vécus. Cela permettrait de souligner la mosaïque de perception qui fait la richesse de ce territoire. L'enjeu est donc d'encourager le débat entre les parties prenantes du paysage afin de favoriser la coopération des acteurs.
Pour que le paysage soit un levier d'action pour les politiques ascendantes tel que le programme LEADER, il doit être porté par les acteurs du territoire.
Mais comment rendre la notion de paysage perceptible par des acteurs qui font eux-mêmes le paysage ?
Afin de faire naître de la concertation autour du paysage, un outil de médiation visant à fédérer les acteurs du marais de la Vergne autour du paysage a été réfléchi. Son but est de leur faire prendre conscience des ses enjeux et potentiels. Cet outils se base sur 5 étapes, temps forts.
Chronologie du projet de médiation
Accès direct aux étapes
Braud-et-Saint-Louis
Etape 1 : Prise de contact
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Comment rencontrer des acteurs et les convaincre de l'intérêt de la démarche ?
Au travers de nos investigations, en allant sur le terrain en observation, nous avons identifié des acteurs tels que Monsieur Egretier (éleveur). Afin de les inclure dans le projet, il est tout d'abord nécessaire d'introduire une rencontre au travers de prospectus et d’événements de présentation de la démarche. Enfin, la rencontre des acteurs via des associations et syndicats (ASAP), agira comme passerelle entre nos univers.
Affiche de promotion du projet de paysage participatif à Villandry (cliquez ici pour découvrir le projet)
Etape 2 : La reconnaissance individuelle des paysages par les acteurs
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Comment comprendre et représenter le paysage vécu de chaque acteur ?
Afin de saisir les nuances de paysage des habitants du Marais de la Vergne, il semble pertinent de mettre en place un arpentage individuellement avec la personne, où elle pourra exprimer ce qu'elle voit et ce que cela lui évoque. Un travail de retranscription graphique visuelle (croquis, maquettes, axonométrie...) permettra de créer un support de discussion pour la suite.
Maquette 3D utilisée pour visualiser les itinéraires habituels sur la commune de Billom (cliquez ici pour découvrir le projet)
Etape 3 : La mise en commun des paysages
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Comment rassembler les acteurs pour qu’ils soient enclins à partager leur paysage ?
Exploration des pratiques et des savoirs-faire historique :
Les acteurs du Marais de la Vergne possèdent un héritage agricole commun. Ce patrimoine offre la possibilité de mettre en évidence un même intérêt pour ce lieu. Le patrimoine culturel, notamment, peut permettre de sensibiliser le jeune public, en transmettant un savoir-faire historique et traditionnel. La transmission du passé du Marais de la Vergne lie les acteurs et les habitants.
> Exemple : la culture de joncs. Aux mois de juillets et d'août s’effectuait la fauche, le triage, le parage, le séchage et le bottelage du jonc noble. Durant cette période de plusieurs semaines, les habitants du marais de la Vergne travaillaient à une activité commune. Aujourd’hui, la culture du jonc a fortement diminué et s'est transformée avec l'arrivée de la technologie.
Etape 4 : La coopération
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Comment créer du dialogue entre les acteurs du marais de la Vergne ?
Jeu de rôle pour permettre le partage des paysages vécus
Comprendre et mettre en commun la pluralité des paysages vécus permettrait de mettre en évidence la mosaïque de perception qui fait la richesse de ce territoire. L'objectif est donc d'encourager le débat entre les acteurs afin qu'ils prennent conscience des enjeux de chacun et de leurs réalités paysagères. Ce dialogue territorial permet de favoriser la coopération, l'intérêt accordé au paysage est alors plus important. Il fait le lien entre les acteurs et se place au centre des préoccupations, et donc des politiques européennes ascendantes telles que LEADER.
> Format : jeu de rôle sur plateau représentant le marais de la Vergne. Chaque acteur doit échanger son rôle le temps de la partie.
> Déroulement de la partie : Les joueurs doivent faire des compromis et réfléchir collectivement aux enjeux et potentiels de leurs paysages.
> Objectif : mettre en relation la fiction du jeu avec la réalité paysagère du territoire. Créer du dialogue entre acteurs et aborder les différentes dynamiques de paysage, leur lien et leur potentiel.
> Exemple : pour une partie, les acteurs du département et les chasseurs échangent leur rôle et réfléchissent ensemble à une gestion concertée des parcelles.
Etape 5 : La mise en place de projets
L’efficacité et la performance par le paysage
Suite à la phase de dialogue et de réflexion collective quant aux enjeux et potentiels du paysage, les acteurs peuvent ensemble réfléchir à des projets. Ces derniers peuvent permettre d’atténuer certaines tensions, de gérer collectivement, de façon durable et entendue les paysages du Marais de la Vergne et de fédérer les acteurs autour d’intérêts communs.
Exemples de coopération possible dans chaque situation choisie du marais de la Vergne
Au niveau des mares de chasse :
Financement d'une exploitation bovine dans le marais de la Vergne
Au niveau du maraîchage :
Association d’entraide entre producteurs
Photomontage des mares de tonnes du Canal Bellet en été. Le marais asséché et la période de chasse finie, l’éleveur peut faire pâturer ses vaches.
Exemple de coopérative de maraîchers nantais. Les maraîchers mettent en commun le cahier des charges, les idées, les compétences et les moyens. (Cliquez ici pour en savoir plus)
Au niveau de la pêche au carrelet :
Aménagement et entretien des berges entre le Passage et la Patte d'oie
Photomontage d’un aménagement des berges avec un cheminement accessible, une signalétique, du mobilier… Cet aménagement est mis à disposition des pêcheurs et des touristes.
Agriculture
durable
Coopération
Agriculture
durable
Coopération
Tourisme
Patrimoine
Coopération
Photographie sur la culture du jonc, savoir-faire historique.
Passez votre souris sur la carte pour découvrir les projets de coopération
N
Au niveau de l'exploitation bovine :
Financement d'une exploitation biologique dans le marais de la Vergne
Agriculture
durable
Coopération
Schéma de fonctionnement des apports dans la coopération entre une ferme biologique et l’exploitation bovine de M. Egretier.
Sans avoir rencontré les acteurs et par conséquent, sans avoir eu la possibilité de recenser leurs points de vue respectifs sur leurs paysages vécus, il s'agit bien entendu d'une liste non exhaustive de propositions de coopérations envisageables. Le travail sur les seuils, réalisé par le Groupe 3, offre lui aussi des propositions d'actions pouvant être abordées et réfléchies collectivement.
Agriculture
durable
Coopération
Actuellement le paysage n'est pas identifié comme levier d'action par les Politiques Européennes telles que LEADER et Natura 2000. Il nous apparaît cependant comme un outil pertinent et transversal en terme de coopération, de patrimoine, d'environnement et de développement économique. Il permet de mobiliser les acteurs pour façonner leur territoire et donner les nouvelles orientations des politiques européennes.
L'équipe :
Flore-Anne FROT
Dep1
Agnès Hingand
Cpep2
Valentine LECRENAY
Cpep2
Ambre LAMARCHE
Cpep2
Zhuoran CHEN
CIEPT